De l'origine de la terre des éléments
Histoire orale.
Ayant pensé ce monde, l'Unique sépara quatre filaments de son esprit afin qu’ils lui donnent substance et le façonnent à Son idée puis Il reporta un temps Son attention sur d’autres pensées. Les filaments travaillèrent le néant pour en extirper une Matière Brute apte à être modelée selon Sa vision. Elle était plus qu’inscrite au fond d’eux, elle était leur essence même. Eux quatre ne formaient encore qu’un, un entre eux, un avec Lui.
Il en fut ainsi pendant un morceau d’éternité au cours duquel ils façonnèrent cet espace où est situé notre monde. Tout entiers attelés à cette œuvre ils n’avaient (hélas ou heureusement selon le point de vue) pas le pouvoir de l’Unique. Issus de Lui, faisant partie de Lui, ils n’étaient pas Lui. Au fur et à mesure qu’ils travaillaient la matière, celle-ci les côtoyait, les enveloppait et pour finir les imprégnait.
La matière disparate et imparfaite différencia ainsi les filaments. Leur unicité se rompit et ils prirent forme selon la matière qui s’était agglomérée en eux. Ainsi furent créés puis (dé)formés Posicillon, Fimine, Eolia et Vulfume.
Les créations des quatre devinrent à leur tour teintées par la substance dominante de leur géniteur. Tout d’abord de manière inconsciente puis, au fur et à mesure que les quatre prirent
conscience de ce qu’ils devenaient, ils intégrèrent volontairement une partie d’eux-mêmes dans chaque création. Les formes et êtres ainsi créés devinrent de moins en moins stables, un certain
nombre ne survivant pas et les autres, incomplets, ayant du mal à évoluer.
Une sorte de compétition s’instaura alors entre ces 4 dieux et ce fut à celui qui créerait quelque chose capable de résister au temps et de soumettre les créatures façonnées par les autres dieux.
Nul ne sait combien de temps dura cette course à la performance entre les quatre mais elle se transforma inexorablement en une guerre divine à côté de laquelle le Cataclysme que nous connaissons
fait pâle figure. Peu de choses nous restent de cette période mais la faible connaissance que nous en avons est suffisante. Ce fut une ère où proliférèrent des noirceurs et des éclats foudroyants
dont les noms mêmes recelaient de dangereux pouvoirs. Espérons donc que rien ne subsiste à ce jour car même le plus infime résidu de ce savoir pourrait dévoyer le monde
actuel.
Or donc cette ère funeste prit fin un jour. Intervention de l’Unique, prise de conscience des quatre ou autre, la raison en est tombée dans l’oubli. Cependant, pour recréer un peu d’ordre dans ce chaos, l’Unique prit une dernière partie de Lui afin de donner naissance à un être capable de réunifier l’œuvre des quatre dieux.
Malheureusement cette entité hésitait entre deux marches à suivre : détruire ce qui avait été engendré et déformé pour recommencer à zéro ou laisser vivre l’existant en le laissant s’améliorer au
contact d’autres œuvres plus abouties. Tiraillé entre ces deux options si fortement, son unité fut elle aussi brisée et il donna naissance à deux êtres opposés :
- Quen respectait toutes les créations de l’Unique ainsi que celles des autres dieux car elles possédaient un souffle de l’Unique aussi infime soit-il : il se concentra sur la création d’êtres
plus proches de la vision de l’Unique et donc habités en parts égales par les quatre éléments.
- Niue considérait que toute création ne pouvait s’éloigner de la vision que l’Unique en avait sous peine d’annihilation. Il s’évertua donc à détruire toutes les créatures qu’il jugeait indignes.
N’étant pas assez puissant pour détruire les quatre aberrations élémentaires comme il les appelait, il s’efforça par tous les moyens de détruire leurs créations.
Si les quatre avaient cessé leur surenchère destructrice, ils n’étaient cependant pas encore résolus à travailler de concert ni même à accepter l’aide ou les conseils de Quen. De son côté Niue ne resta pas inactif, et pendant que les propositions de réconciliation de son opposé se heurtaient à une fin de non recevoir il profita de la désunion qui régnait pour ourdir de sombres machinations. La plus terrible d’entre elles étant l’avènement de ceux que l’on nommera plus tard les Gardiens de l’Épouvante.
Les dieux devinrent plus attentifs pourtant après la bataille du carrefour de Tael Loht où le plus puissant clan de la race des dragons sorciers, emmené par le redoutable Siktaar, se heurta aux
Gardiens de l’Épouvante alors peu connus. Habitués à des combats aussi brefs que violents, ils furent déstabilisés par la résistance qu’opposèrent ces nouveaux combattants. L’affrontement dura
des heures et des jours, penchant d’un côté ou de l’autre suivant la tournure des événements et les imprévus inhérents à toute lutte jusqu’à cette fatidique 94ème heure qui vît choir Siktaar. Son
trépas scella le destin du clan car, privé du catalyseur de magie qu’était leur seigneur, les autres dragons virent leur puissance magique considérablement amoindrie. Leur anéantissement fut
presque total car seul deux membres du clan survécurent.
On se rendit compte par la suite de ce mode opératoire que respectaient les Gardiens de l’Épouvante : que leurs adversaires se rendent ou non, ils étaient quasiment tous massacrés à l’exception
de quatre qui étaient fait prisonniers. Leur sort n’était pourtant pas plus enviable car ils étaient torturés jusqu’à ce que deux d’entre eux livrent des informations. Les quatre étaient ensuite
réunis et on leur annonçait le nom de ceux qui n’avaient pas résisté au questionnement ainsi que les informations qu’ils avaient fournies. Ceux-là étaient enfin libérés afin de narrer la défaite
à leur camp et de susciter la peur. On ne revoyait jamais ceux qui avaient résisté plus longtemps. On suppose qu’ils étaient de nouveau torturés jusqu’à la mort mais connaissant la noirceur des
intentions de Niue on ne peut en être sûr.
L’issue eut pu être différente si d’autres clans leur avaient prêté main-forte. Mais bien qu’ils aient eu vent de ce qu'il se passait ou qu’ils aient assisté à la déroute pour certains, aucun n’avait pressenti le danger et la nécessité de s’unir pour faire face à cette nouvelle menace. Cet épisode marqua un tournant dans la vie des hommes et des bêtes peuplant la Terre des Éléments car si jusqu’à présent ils avaient lutté pour établir la suprématie de leur élément, ils devaient dorénavant lutter non moins farouchement pour leur simple survie.
Il fallut l‘intervention des dieux pour empêcher l’éradication de toutes les formes de vie qui se profilait dans un proche avenir. Certains des Gardiens purent être détruits et d’autres, trop
puissants, virent leurs esprits et leur corps (la traduction de certains ouvrages laisserait entendre que plusieurs esprits résideraient dans le corps de chaque gardien) séparés puis éclatés en
morceaux. Ces éclats furent alors scellés dans divers réceptacles vivants ou inertes.
Aujourd’hui encore ces actes nous poursuivent. Comment peut-on ne pas s’interroger par exemple sur ce qui est arrivé à Rebom ? Malgré des pratiques douteuses, il avait
maîtrisé les quatre éléments et son être avait atteint un temps l’unicité recherchée par Quen. Niue quant à lui ne l’entendait pas de cette oreille il ne pouvait concevoir qu’une imperfection
puisse se transformer et rejoindre SA vision. Il y a fort à parier qu’il est à l’origine de la perversion finale de Rebom qui le transforma en une de ses ombres
servantes.
Premiers chants du monde dans la tradition elfe
Traduit de l'elfe ancien par
Suyvel Ayflesh.
Au commencement était l’Unique.
Il était seul, il était tout.
Et tout était l’Unique.
L’Unique comprit qu’en cet état de choses, il représentait une forme de perfection, et il vit que cela était bon. Mais la solitude finit par Lui peser. L’ennui
s’installa en Son Cœur. Alors Il choisit de s’abandonner au sommeil, pour un temps. Et avec le sommeil vinrent les songes.
L’Unique rêva qu’Il donnait vie à des enfants, issus de Son Esprit. Il leur enseignait, Il communiquait avec eux. Il put ainsi remédier à son ennui et chasser sa
solitude.
Lorsque l’Unique se réveilla, Il fut très triste que tout ceci n’ait été qu’un songe. Mais voilà que devant Lui se dressaient Ses Enfants, tels qu’Il les avait
pensés.
Ainsi
survint le Premier Rêve, dont naquirent les Grandes Divinités.
L’Unique leur donna chacun un nom mais ils n’y répondirent pas. Il n’existait aucun mode de communication. Comme l’Unique avait été seul jusqu’alors, Il n’avait jamais eu le besoin de s’adresser
à qui que ce soit. L’Unique songea donc à un moyen de remédier à cette carence.
Ainsi naquit le
Verbe.
Il le leur enseigna et leur fit ensuite don de nombre de Ses Divins Pouvoirs. Lorsqu’ils furent plus matures, Il put échanger avec eux, s’enrichir de leurs idées et débattre sans fin. Parmi eux,
Quen et Niue furent les plus émerveillés et les plus enthousiastes de tout ce qu’Il leur révélait. L’Unique n’était plus seul, Il n’était plus parfait, mais Il était heureux. Il finit par
éprouver de la fatigue de ces longs débats avec Ses Enfants et le sommeil vint Le prendre.
Il eut un songe dans lequel Ses Enfants Le pressaient de leur accorder plus de choses à découvrir. Alors l’Unique conçut la Matière, car jusqu’ici tout n’avait été qu’Esprit. Pour s’assurer
qu’elle porte en elle une grande richesse et puisse répondre aux attentes de Ses Enfants, Il la rêva composée de quatre éléments basiques, qui pourraient être mêlés en proportions diverses, et
donner des résultats fort différents. Il réunit les quatre éléments dans Ses Mains et les disposa au gré de Son Plaisir.
Ainsi survint le Second Rêve, d’où
naquirent les Quatre Eléments.
Si le résultat parut prometteur à l’Unique lorsqu’Il se réveilla, il Lui posa néanmoins un problème, car les Eléments n’avaient pas leur place dans le monde d’alors. Ils ne pouvaient s’y
assembler et se combiner durablement. Alors l’Unique sépara le Plan Matériel du Plan Spirituel. Il installa les Quatre Eléments sur le Plan Matériel et s’en servit pour produire des choses
nouvelles et merveilleuses. Depuis le Plan Spirituel, Ses Enfants et Lui purent contempler Ses Œuvres. Puis Ses Enfants en voulurent encore davantage, mais l’Unique ne pouvait passer tout Son
Temps sur le plan matériel et consacrer tout Son Esprit sur cette tâche. Epuisé, Il finit par s’endormir.
L’Unique eut un songe dans lequel il donnait de nouveau vie à des enfants, mais cette fois liés au Plan Matériel. Il leur enseignait la maîtrise des éléments et l’art de les façonner, de les
modeler selon Son Désir. Leur attachement au Plan Matériel leur permettait d’y demeurer en permanence et ils secondaient efficacement l’Unique dans Son Œuvre créatrice.
Ainsi survint le Troisième Rêve, d’où
naquirent les Dieux Elémentaux.
Lorsqu’Il s’en éveilla, l’Unique contempla les Quatre si différents de Ses Autres Enfants et les nomma Eolia, Fimine, Posicillon et Vulfume. Puis Il leur demanda de Lui montrer leurs talents. Les
grandes divinités s’extasièrent devant le spectacle de la créativité des Quatre. L’Unique n’était néanmoins pas totalement satisfait de leurs créations éparses et désordonnées. Un jour, Il vint
les trouver et leur enseigna l’Art de combiner les éléments entre eux. Puis il leur révéla Son Grand Projet pour les Quatre. Cela fait, il se retira, car Il avait longtemps parlé. Et à nouveau Il
éprouvait le besoin de repos.
Il songea à Son Projet, les Quatre oeuvrant de concert à la plus vaste réalisation qu’ils n’eussent envisagée à ce jour. Tout le secret de sa réussite tenait dans l’harmonie et l’équilibre des
éléments qui étaient apportés et assemblés par les Quatre. Inspirés par l’Unique, les Dieux Elémentaux accomplirent des prodiges et le résultat fut encore plus beau que l’Unique l’avait
espéré.
Ainsi survint le Quatrième Rêve, dont
naquit le Monde.
Lorsque l’Unique s’éveilla et découvrit Son Œuvre, Il en fut réjoui et la nomma Terre des Eléments. Toutefois, beaucoup restait à faire. Les Quatre y exercèrent tout leur talent et toute leur
créativité qui était grande, ainsi que l’avait souhaité l’Unique. Fimine dressa des montagnes, en transforma certaines en plateaux et creusa des vallées profondes. Posicillon lança de grandes
vagues à l’assaut des côtes pour les modeler selon son bon plaisir. Eolia souffla sur les eaux et les terres pour les sculpter. Vulfume fit exploser certaines montagnes, projeta des nuages de
fumée noire et dessina des rivières de feu.
L’Unique fut content mais trouva le spectacle trop statique. Alors Il fit don du Temps au monde, afin qu’il s’animât et évoluât. Vulfume mit ses rivières de lave en mouvement. Posicillon
accueillit la roche en fusion dans ses mers et sculpta cette nouvelle matière de façon inattendue. Vulfume en profita pour transformer de grandes quantités d’eau en vapeur. Intéressée, Eolia s’en
empara et modela les nuages, qu’elle envoya vers les terres et s’amusa ensuite à les arroser. Fimine accueillit les flots célestes avec surprise puis, ravie, elle creusa des lits pour recueillir
l’onde, la canaliser et la rendre finalement aux océans et à Posicillon.
Longtemps, l’Unique et les grandes divinités contemplèrent les Quatre à l’ouvrage. Toutefois l’Unique savait que Sa Création était encore incomplète. Il alla chercher le repos et l’inspiration
dans les songes. Il y vit les Quatre créer de nouvelles formes complètement différentes. Des œuvres dynamiques, capables de se transformer et d’évoluer par elles-mêmes.
Ainsi survint le Cinquième Rêve, dont
naquit la Vie.
L’Unique alla enseigner aux Quatre l’art d’insuffler la vie à leurs nouvelles créations, et ceux-ci mirent très vite cette leçon à profit. Posicillon fut le premier à donner naissance à une forme
de vie, si petite qu’elle en était invisible. Fimine, enthousiaste, donna toute la mesure de son talent pour créer une flore belle et variée dont elle couvrit les terres. Et les Quatre
s’attelèrent, chacun de son côté ou à plusieurs, à la délicate tâche de la faune. Cela leur prit énormément de temps, mais faune et flore couvrirent le monde, à tel point que la place commençait
à se faire rare, et limitait la création et la prolifération de la Vie. Alors l’Unique fit don au monde de l’Âge et de la Mort. Et la Vie reprit son essor de plus belle.
Même alors, l’Unique savait que tout n’était pas achevé, loin de là. Mais Il était satisfait du résultat obtenu, car la Terre des Eléments – berceau destiné à Son Dernier Enfant – était
maintenant prête à accueillir Son Plus Grand Dessein.
L’Unique se retira pour réfléchir à la nature et à la forme de ce qu’Il souhaitait offrir à ce monde. Le sujet était vaste et complexe, même pour Son Esprit, et la lassitude finit par le gagner.
Il s’abandonna au sommeil.
Ses songes lui montrèrent ce qu’Il cherchait depuis longtemps : des formes de vie évoluées, des créatures douées d’entendement qui comprenaient leur existence et le monde qui les entourait.
Ainsi survint le Sixième Rêve, dont naquit
la Conscience.
Lorsque l’Unique fut réveillé, Il alla enseigner aux Quatre le don de conscience aux futures créatures que les Dieux Elémentaux engendreraient. Les Quatre
redoublèrent d’efforts pour créer des espèces dignes de cette offrande, et les Six Races Premières – Démons Sirathiens, Dilths, Dolmants, Dragons, Elfes de Lumière, Ents – virent le jour.
L’Unique les bénit et leur offrit le Libre-Arbitre. Puisque ces êtres étaient en mesure de comprendre Ses Desseins, Il souhaita qu’elles fussent en mesure de choisir d’y participer ou non, et de
faire de leur existence ce que bon leur semblerait.
Pleinement satisfait, l’Unique confia la Terre des Eléments aux Quatre et tourna Son Esprit vers d’autres sujets.