La vision de la galaxie dans la culture humaine

Par Salaha Luvia

La configuration du système planétaire englobant la Terre des Éléments a fait l'objet de nombreuses études au cours des siècles passés. La théorie la plus connue est celle retranscrite par Ifrit dans son ouvrage « Cycle stellaire et cycle calendaire ». Il y est décrit un système complexe, composé d'une planète, de quatre soleils géostationnaires, et de quatre lunes en révolution autour de ces soleils. Si cette configuration satisfait parfaitement aux préceptes religieux, elle demeure incomplète d'un point de vue scientifique.

1. De la composition de la galaxie

Au fil des ans, les hommes ont développé plusieurs courants d'astronomie. La majorité d'entre eux s'accorde sur la composition de notre galaxie. Nous tiendrons donc pour acquis les points suivants :
- le monde est fixe (ni mouvement, ni rotation),
- la galaxie compte quatre soleils fixes également et émettant les quatre lumières primaires : bleue, jaune, rouge et verte,
- chaque soleil possède un satellite lunaire en rotation.

Les divergences commencent lorsqu'il s'agit de définir la forme du monde et des astres, leurs positions absolues, ou encore la manière dont la lumière se propage à travers l'espace.

 

2. De la platitude du monde

Le monde est-il une sphère ou un disque ? Depuis les débuts de l'astronomie, ces deux concepts majeurs s'opposent. Les partisans de la sphère avancent pour principaux arguments la perfection de la forme sphérique et la circulation de l'eau à la surface du monde. La théorie du disque est, quand à elle, basée sur l'étude de la propagation de la lumière et la position des quatre soleils.

2.1. Les points cardinaux, référentiel partiel ou absolu ?

La majorité des études astronomiques placent les soleils géostationnaires aux quatre points cardinaux. Or, si un tel référentiel serait absolu dans le cas d'un monde plat, il resterait relatif dans celui d'un monde sphérique.

Les partisans de la sphère ont par le passé apporté la justification suivante : la position des soleils est définie par rapport à la ville de Til'Ra où résidaient les premiers astronomes humains. Ainsi, lorsqu'il est dit : « le soleil de l'Est est jaune orangé », l'Est représente un point de l'univers à la verticale de Nouwlmac. Pour les gobelins de la région Akÿco, le soleil jaune orangé n'est donc pas à l'est mais au-dessus de leurs têtes. Le monde et les quatre soleils formeraient alors une croix vue depuis un point de l'univers situé à la verticale de la mer Northee. Cela impliquerait que de la région de Melrath Zorac on ne puisse voir aucun soleil. Mais alors qu'elles sont ces quatre cercles colorés dans le ciel ? Selon Pit Gordes, astronome Til'Lunide, il s'agit de « l'image des quatre soleils, renvoyées par le champ magique qui entoure notre monde. »

 

Le système présenté par les partisans de la théorie du disque a l'avantage de la simplicité. Ta Liaisset, astronome Til'Rathien, a écrit : « Le monde est un disque dont le centre se situe dans les Montagnes Furieuses, au sud de Vulfumus. Les quatre points cardinaux forment donc un référentiel absolu dont l'origine est placée en ce centre. Les quatre soleils se situent à des milliers de kilomètres au dessus de la surface du disque et à une distance tout aussi grande de son bord. » Ainsi, où que l'on se trouve sur le disque, les quatre soleils sont visibles aux quatre points cardinaux.

 

2.2. Propagation de la lumière

L'existence des quatre couleurs primaires, bleue, jaune, rouge et verte, est admise par tous. De nombreuses expériences ont également montré que le mélange de ces quatre couleurs forme la couleur blanche. Ce phénomène est applicable à la lumière. L'astronome Mill Haye a écrit à ce sujet : « La lumière de chaque soleil est monochromatique. Afin de former la lumière blanche qui éclaire notre monde, il est nécessaire de mêler les rayons des quatre soleils. » Mais alors, comment les quatre lumières sont-elles mélangées ?

Les partisans de la sphère avancent à nouveau la théorie magique, approuvée par les prêtres. Selon Pit Gordes : « L'Unique, en sa grande sagesse, a doté le monde d'un champ magique. Quand la lumière des quatre soleils entre dans ce champ, elle est mélangée. La lumière blanche obtenue est ensuite envoyée en quantité égale tout autour de la planète. »

Les défenseurs du disque ont une tout autre explication. Ta Liaisset affirmait : « Les quatre soleils se situant à une distance égale de la surface du monde, leurs rayons nous parviennent en égale quantité. Ainsi, nous percevons la somme de leurs quatre lumières élémentaires : la lumière blanche. C'est ce que nous appelons la « zone blanche » de la galaxie. »

2.3 Circulation de l'eau à la surface du monde

« L'eau est l'un des quatre éléments à la base du monde. Comme les trois autres, elle trouve sa place en chaque être vivant, qu'il soit végétal, animal ou minéral. Toutefois, c'est dans les mers et les océans que l'élément eau prend toute sa splendeur. »

Ces quelques mots, écrits par un auteur anonyme, font une parfaite introduction au dernier point de divergence des partisans du disque et de la sphère. En effet, les deux parties s'opposent sur une question simple : la présence de l'eau à la surface de la terre.

Prenons d'abord une sphère parfaite, la boule de cristal d'une voyante par exemple. Si on verse de l'eau dessus, elle va s'écouler autour et il n'en restera rien. Considérons alors un disque, parfaitement plat. Nous arriverons à la même conclusion. Alors comment l'eau est-elle retenue à la surface du monde ?

Sur ce point, l'explication des deux parties se ressemble étrangement. Tout deux rappellent que le monde n'est pas une sphère ou un disque banal. Il s'agit d'une création de l'Unique, et « si l'Unique créa la magie ce n'est pas uniquement pour occuper les magiciens. » comme le dit si bien Pit Gordes. Sphéristes et Discologues s'accordent donc sur un point : le monde est doté d'un champ magique. Les premiers considèrent que ce champ maintient l'eau à la surface du monde en l'attirant vers son centre. Les seconds affirment que l'eau est simplement retenue par son poids, et que le champ magique se trouvant sur la circonférence du disque, lie ses côtés diamétralement opposés entre eux. En somme, ce qui passe par le bord côté est se retrouve côté ouest.

 

2.4 Alors sphère ou disque ?

Les astronomes ne sont jamais parvenus à se départager. Ce texte rassemble les principaux arguments des deux courants de pensée. La liberté est laissée au lecteur de répondre à cette question existentielle.

 

3. De la couleur des lunes

Depuis la nuit des temps, une question reste sans réponse : quelle est la couleur des lunes ? L'homme se fiant à ses yeux a pu facilement déterminer la couleur des soleils. Mais les lunes lui apparaissent changeantes. Selon leurs positions, elles semblent tantôt blanches, tantôt grises. Parfois elles se teintent même de la couleur du soleil autour duquel elles gravitent. Trois courants de pensées se sont distingués au fil des ans.

Les prêtres des Dieux Élémentaires tiennent le discours suivants : « Notre Dieu a doté le monde d'un soleil à son effigie. Puis, pour que ses enfants puissent se reposer, il offrit au soleil une sœur, la lune. L'astre lunaire absorbe la lumière de son frère solaire pour que vienne la nuit. Il est évident qu'elle est de la même couleur que lui. »

Les philosophes ont une opinion différente. Pour eux, la nuit ne peut être apparentée qu'aux ténèbres. Les lunes sont forcément de couleur noir, ou gris foncé. Seules ces couleurs peuvent totalement occulter la lueur des soleils. Les théologiens leur donnent raison faisant référence à un triste passage de l'histoire des premiers temps : la venue de Nyx et d'Erèbe sur la Terre des Éléments. Ils rappellent que les lunes ne sont pas une création de l'Unique, ni même de ses Enfants. Elles sont le fruit des ténèbres, issus des lambeaux du manteau de Nyx.

Les savants, enfin, donne aux lunes une couleur blanche. Si vous éclairez une surface blanche avec une lumière colorée, cette surface se teinte immédiatement de cette couleur. Ainsi les lunes apparaissent le plus souvent d'une couleur blanche, car elles sont éclairées par les quatre soleils. Et, lorsqu'elles sortent de la zone blanche, elles prennent la couleur du soleil autour duquel elles tournent.

D'autres théories furent développées par le passé, toutefois, elles ne sont guère dignes d'intérêt tant elles paraissent farfelues et déplacées.


Plate ou ronde la planète est l'harmonie née des quatre éléments, à l'image des lueurs venues des quatre soleils qui s'unissent pour devenir la lumière bienveillante qui éclaire nos vies. Si l'Unique a pensé se monde à son image, les Quatre y ont apporté la touche finale. Sans doute ne trouverons-nous jamais les réponses aux questions qui demeurent, car qui peut se vanter de connaître la volonté divine ?

 

_________________________________________________

 

La plume fut posée dans l'encrier. Le parchemin fut roulé par des doigts habiles. Sourire aux lèvres, la magicienne rangea ses affaires. Après des périodes de recherche et de travail appliqué, son ouvrage était achevé. Peut-être le confierait-elle au bibliothécaire de l'Académie pour avoir son avis. Ou alors le glisserait-elle dans un rayon à son insu. Prendrait-il la poussière sur une étagère de son appartement au bastion de l'Alliance ?

Son regard s'éclaira comme elle prenait sa décision. L'esprit satisfait, elle regagna sa chambre d'auberge pour prendre un repos mérité.